LE SHOGUNAT DE KAMAKURA (鎌倉幕府)
Le shogunat de Kamakura ou bakufu de Kamakura (鎌倉幕府) porte aussi l’appellation d’époque Kamakura (鎌倉時代). Les historiens s’accordent pour donner la date de départ de cette période à avril 1185, victoire du clan Minamoto sur les Taira lors de la bataille de Dan-no-Ura ; ou 1192, date à laquelle Minamoto no Yoritomo obtient le titre de shogun (将軍). Ce terme est communément traduit par “général” et avait anciennement pour signification “général pacifiant les barbares”.
Minamoto instaure par la suite le régime shogunal au Japon, en dualité avec le système impérial existant composé d’un empereur et d’un empereur-retiré (le premier étant le représentant officiel du pouvoir, le second exerçant la réalité du pouvoir en dictant la conduite de l’empereur). Il faut noter toutefois que le shogun dépend, au moins en partie, de l’empereur.


Peinture sur rouleau de Minamoto no Yoritomo
La capitale japonaise du pouvoir ayant été à Nara (奈良), puis à Kyôto (京都) avec pour premier nom Heian-kyô (平安京, “capitale douée de paisibilité”) mute donc d’emplacement pour Kamakura (鎌倉市). Minamoto possède l’aptitude de nommer des administrateurs, ou des fonctionnaires, auprès de sa cour dès le 21 août 1191, par le biais de Kudashibumi (下文, littéralement “lettre adressée à des inférieurs”). Malgré la crise civile de 1221, et les diminutions de privilèges octroyés au shogun par l’empereur, le shogun peut toujours émettre ces Kudashibumi afin d’octroyer un fief et/ou des domaines ou des choses plus minimes comme des confirmations d’héritages.


Mon du clan Minamoto
En matière de justice, le shogun a la possibilité d’établir une enquête et de demander des comptes à ses vassaux. En 1246, par exemple, une pétition est établie, par des moines du temple de la province de Satsuma, par rapport aux mauvais traitements infligés par le jitō (intendant) envers ces religieux. Après enquête, ce jitō ne sera pas poursuivi car les preuves sont manquantes. Toutefois, il sera visité de temps à autre par des agents du shogun. Un autre exemple est celui de 1244 où le shogun décide de rétablir les possessions d’un seigneur de la province de Hyūga.
L’appareil juridique japonais est d’autant bien huilé que celui-ci se fonde sur des serments ainsi que la présentation de titres officiels (de propriété, de titre, de fonction, etc.) pour qu’un procès soit établi, en plus d’un examen sur la validité des titres. Néanmoins le système de preuves n’est pas clair puisqu’un témoignage oral, comme un témoignage écrit, est considéré comme preuve accablante dans certains cas. Il faut ajouter le côté divin lors des procès où les dieux sont en mesure de punir ceux qui ne respectent pas le serment.


Généalogie des membres du clan Minamoto
Comme nous pouvons le voir, le shogunat s’insère dans les traditions établies par les empereurs du Japon, avec quelques inspirations sur le système chinois des Tang. Malgré son caractère militaire originel, les shoguns obtiennent beaucoup de compétences au point que l’empereur retiré Go-Toba, en 1221, tente de destituer le shogun. Mais grâce à l’intervention de Masako Hōjō, la majorité des guerriers rejoignent la bannière shogunale et renversent Go-Toba le contraignant à l’exil jusqu’à sa mort. Les invasions mongoles de 1274 et 1281 vont affaiblir économiquement le Japon, et le pouvoir des Hōjō continue de croître au point qu’ils sont en mesure de décider qui sera le prochain shogun. La destitution des Hōjō en 1333, en prime de la disparition sur la scène des Minamoto dès le milieu du XIIIe siècle, vont emmener le shogunat de Kamakura à s’éteindre pour laisser place à une nouvelle ère shogunale nommée “Shogunat d’Ashikaga” dès 1336.


Peinture sur rouleau de Go-Toba Mon du
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Article établi et rédigé par les soins de Mikel Billoud, étudiant en deuxième année de Master en histoire médiévale.
Source
- JOÜON DES LONGRAIS (F.), Âge de Kamakura, sources (1150-1333) archives chartes japonaises (Monjo), Paris, Maison Franco-Japonaise, 1950.
- MASS Jeffrey P., The development of Kamakura rule 1180-1250, a history with documents, Californie, Stanford University Press, 1979.
- SOUYRI Pierre-François, Les guerriers dans la rizière, la longue histoire des samouraïs, Paris, Flammarion, 2021.
- Histoire du Japon médiéval, le monde à l’envers, Paris, Perrin, 2013.